Les défis d’une gestion équilibrée du portfolio d’innovations

L'importance d'équilibrer le portfolio d'innovation

Quand on parle d’innovations, on se réfère  généralement à 4 types d’innovations que les entreprises innovantes gèrent selon des méthodes, des budgets et des échelles de temps différents. Ces innovations sont: (i) L’innovation incrémentale, (ii) l’innovation adjacente, (iii) l’innovation disruptive (ou de rupture) et (iv) l’innovation radicale (Breakthrough). À moins que cela ne soit déjà fait, je vous invite à lire mon dernier article intitulé les 4 innovations pour propulser votre entreprise. Dans cet article, je partage avec vous mes réflexion sur certaines méthodes utilisées pour bien construire un portfolio d’innovations équilibré.  

Depuis plusieurs décennies, les entreprises utilisent la matrice d’Ansoff, un outil fort simple et relativement performant, pour définir leurs choix stratégiques de croissance. Ainsi, grâce à cet outil, les entreprises allouent les ressources humaines et les budgets appropriés pour atteindre leurs objectifs.  Cette matrice se divise en 4 grandes catégories : pénétration de marché, développement de marché, développement de produit et diversification.

L’interprétation des quatre catégories se lit de la manière suivante:

  • (i) la pénétration de marché consiste à faire de la promotion pour vendre plus de produits existants à des clients existants, 
  • (ii) le développement de marché permet de vendre des produits existants à de nouvelles cibles, par exemple l’ouverture de nouveaux territoires, 
  • (iii) le développement de produit quand à lui offre la possibilité de fidéliser les clients existants en leur proposant des produits plus actuels pour remplacer les anciens produits. Tous les produits de grande consommation suivent cette tactique: automobile, industrie du jeu, électronique, ….etc
  • (iv) La diversification permet l’audace de lancer un nouveau produit dans un nouveau marché et ce dernier peut être apparenté ou non apparenté. Un marché apparenté nous est familier, par exemple on passe de la vente de composants à la vente de modules ou de systèmes. La diversification non apparentée se fait sur un marché sur lequel vous n’avez aucune expérience et aucune industrie. Par exemple un fabricant de potage investissant dans la construction automobile!  

Selon l’orientation stratégique choisie, l’entreprise déploie la tactique appropriée sachant qu’elle dispose d’une conjoncture économique favorable et la capacité à innover.  Même si cet outil demeure très utilisé, il présente néanmoins l’inconvénient d’une représentation binaire marché-produit (actuel vs nouveau) et ne permet pas d’avoir une vision globale pour bien identifier l’ensemble du portfolio des innovations en cours. 

Bansi Nagji et Geoff Tuff ont publié en 2012 dans Harvard Business Review « Managing Your Innovation Portfolio » un article fort intéressant dont je reprends ce que les auteurs appellent « The Innovation Ambition Matrix » afin de faire le parallèle avec la matrice d’Ansoff. Cette nouvelle représentation corrige la notion binaire   «actuel vs  nouveau» d’Ansoff et propose un schéma global et précis de l’ensemble du portfolio des innovations en cours dans une entreprise innovante. On y distingue 3 zones: la première représente l’essentiel des activités d’optimisation des produits pour bien servir la clientèle existante d’une entreprise, la deuxième zone est consacrée aux innovations incrémentale et adjacente pour assurer l’expansion de l’entreprise et la troisième zone est dédiée aux innovations radicales avec l’objectif de créer de nouveaux marchés.  En se basant sur cet outil, les auteurs ont mené une large enquête auprès d’entreprises dans 3 secteurs différents : industriel, technologique et produits de consommation afin de connaitre l’allocation des ressources humaines-financières attribuée aux différentes activités d’innovation.

Leurs résultats montrent que les entreprises qui réussissent le mieux, tous secteurs confondus, gèrent leur portfolio d’innovations selon les proportions suivantes: 70% à l’optimisation des produits existants; 20% aux innovations incrémentales et 10% aux innovations radicales. Ce qui est important à retenir est que cet outil permet d’équilibrer les chantiers d’innovations en cours en fonction de vos ambitions et de votre industrie. L’intérêt premier d’une gestion globale de l’innovation est la mesure des retombées économiques de vos investissements. En effet, on peut chiffrer exactement les bénéfices de chaque innovation en fonction des gains de productivité et de rendement de fabrication, l’introduction de produits adaptés dans des marchés adjacents et/ou l’introduction de nouveaux produits dans de nouveaux marchés. Dans leur enquête, Bansi Nagji et Geoff Tuff ont rapporté un résultat fort intéressant.  Ils ont découvert que les retombées économiques (ROI) du même portfolio d’innovations sont distribuées de façon inverse, soit 70% pour les innovations radicales, 20% pour les innovations incrémentales et seulement 10% des retombées positives sont attribuées aux innovations de types optimisation de produits! 

Bansi Nagji et Geoff Tuff ne mentionnent pas de façon explicite l’importance de l’innovation disruptive.  Dans un effort de clarté, je propose la représentation montrée plus bas pour mieux visualiser les 4 innovations qui permettent vraiment de propulser une entreprise.  Cette représentation est inspirée de l’article de Mark Dodgson et al dans The Oxford Handbook of Innovation Management publié en 2014. Les flèches suggèrent des orientations stratégiques possibles sachant que le défi pour les mener de façon simultanée à l’intérieur d’une seule culture d’entreprise est très élevé!

 Conclusion

Je souhaite que cet article a permis d’apporter certains éclairages sur:

  • L’importance de bien équilibrer le portfolio des innovations et d’oser allouer plus de ressources aux innovations qui non seulement rapportent un excellent retour sur investissement  mais assurent la pérennité de l’entreprise à moyen et long-terme et,
  • l’importance d’intégrer l’innovation de façon systématique dans les stratégies d’entreprises

Dans un prochain article, nous allons aborder le style de gestion traditionnel issu des écoles de gestion&commerce et nous allons tenter de montrer ses limites dans un environnement d’hyper-compétitivité tel que décrit par Ian MacMillan.  Un sujet sensible mais d’une grande importance quand on parle d’innovation.

À très bientôt et n’oubliez pas de partager cet article sur vos réseaux sociaux !

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